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A moins de 30 mois des échéances de 2023: la proposition de loi Tshiani suscite des remous

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A moins de 30 mois des échéances de 2023: la proposition de loi Tshiani suscite des remous

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Tirant la sonnette sur les risques de dérapages, VSV pense que le texte est important mais inopportun pour le moment; tandis que d’autres experts comparent cette loi au concept « ivoirité »
Par GKM

« Congolais de père et de mère », la proposition de loi Tshiani, endossée par le député Nsingi Pululu, suscite des vagues de réactions avant même son adoption à l’Assemblée Nationale. Le texte interdit aux citoyens nés des parents étrangers d’être candidats notamment à l’élection présidentielle. L’initiateur de cette proposition se défend de ne cibler aucun acteur politique.

Tout est parti d’un tweet il y a quelques semaines de Noël Tshiani Muadiamvita, professeur d’université et ancien candidat à l’élection présidentielle de 2018.  » Pour chaque candidat à la présidence et aux fonctions de souveraineté de la RDC, on devra connaître les pays d’origine de son père, sa mère et son épouse en plus du niveau d’études et d’expérience professionnelle. Ces critères constituent le minimum dans une démocratie « , écrit Noel Tshiani dans son compte twiter.

Le banquier, auteur de l’ouvrage « Plan Marshall de Noël Tshiani pour la RDC » explique que cette proposition de loi fait partie d’une série d’autres issues de son plan proposé depuis 2016 et qui comprend plusieurs aspects comme le développement économique ou encore la promotion de la paix et de la sécurité. « Le premier aspect c’est de verrouiller l’accès à la présidence de la République et d’autres fonctions de souveraineté en République démocratique du Congo.

Une loi comme celle que je propose est générale, elle est impersonnelle, elle ne vise aucun individu. Alors si au passage il y a un tel ou un tel autre individu qui est écarté, on ne peut pas prévoir qui sera candidat et qui ne le sera pas, parce qu’à ce stade personne ne s’est déclaré candidat. Donc on ne peut pas viser un individu par rapport aux échéances de 2023″, explique-t-il.

Agitation dans l’opinion

La proposition de loi a du mal à passer auprès de certains Congolais qui semblent instrumentalisés. Me Jacques Hangi, avocat au barreau du Nord-Kivu et chercheur en Droit, estime qu’il y a lieu de rappeler les lois existant en matière de nationalité congolaise pour faire la différence avec ce que propose la loi Tshiani.

 » La loi numéro 04/024 du 12 novembre 2004 relative à la nationalité congolaise a établi deux types de nationalité congolaise en RDC, à savoir la nationalité congolaise d’origine et la nationalité congolaise d’acquisition. Mais en parcourant la loi Tshiani, particulièrement en son article 24, celle-ci a tendance à créer un troisième type de nationalité congolaise lorsqu’elle dispose que l’élection d’un individu à de hautes fonctions publiques est subordonnée à sa naissance d’un père et d’une mère congolais.

Pourtant la Constitution exige qu’on soit titulaire de la nationalité congolaise d’origine pour être élu président de la République « , souligne le juriste intervenant sur les ondes de la Deutsche Welle. Ce débat sur la « congolité » rappelle aussi des faits historiques et autres dérives qui ont pu être observés dans des pays comme la Côte d’Ivoire par exemple.

 » Entre les Congolais comme le dit la Constitution, il n’y a pas de différence fondamentale. La loi Tshiani vient apporter un élément supplémentaire qui viole la Constitution en ce sens qu’elle fait une distinction claire entre Congolais. Cette distinction est non seulement porteuse de conflits à venir mais surtout elle fragilise une société qui est en pleine construction.

Il est inadmissible quand on voit aujourd’hui encore les conséquences de l’ivoirité en Côte d’Ivoire qu’on puisse importer cette théorie malsaine pour parler de la congolité chez nous », insiste le politologue Jean Claude Mputu à Deutsche Welle.
Après analyse de cette proposition de loi, la Voix des Sans Voix pour les Droits de l’homme (VS), organisation non gouvernementale de défense et de promotion des droits humains, le texte proposé a le mérite, quant à son objet, d’évoquer le principe de l’irrévocabilité de la nationalité congolaise d’origine parce que, comme il est souligné dans le texte  » nous sommes nés congolais, nous vivons congolais, nous mourrons congolais et nous serons enterrés congolais « .

Pour la VSV, il n’est pas très raisonnable qu’une congolaise ou un congolais perd sa nationalité du seul fait d’avoir acquis une autre nationalité. Mais l’organisation pense que pour certaines matières notamment le verrouillage de l’accès à la fonction du Président de la République, Chef de l’Etat, du Président de l’Assemblée Nationale et celui du Sénat réservé aux seuls congolais nés de père et mère, la proposition de loi est importante mais n’est pas opportune surtout en ce moment précis où la RDC n’est pas encore sortie du bout du tunnel en ce qui concerne la paix et la stabilité au regard des dizaines de groupes armées qui écument l’Est du pays. Allusion faite à la milice Bakata Katanga non encore maitrisée et qui disparait et refait surface à des moments inattendus.

La VSV estime également que cette proposition de loi discriminatoire au regard de l’article 13 de la Constitution de la RDC et pense qu’elle est également porteuse des germes des conflits en ce qu’elle peut mettre à mal la paix et la cohésion nationale.
Pour l’organisation, cette proposition de loi peut également conduire à la fragilisation de l’actuelle majorité parlementaire ou au basculement de celle-ci et de ce fait, à une crise politique avec des tensions politiques capables d’occasionner des violations des droits humains et de porter atteinte aux efforts de la consolidation de la démocratie en RDC.

Face à cette situation, l’ONGDH VSV invite le Parlement à faire preuve de beaucoup de sagesse lors de l’examen de cette proposition, afin que les matières controversées fassent l’objet d’un examen minutieux et approfondi en trouvant des mots ou des termes qui rassemblent tous les Congolais au lieu de les diviser avec le risque de conduire à des tensions voire des affrontements fratricides ou tribalo-ethniques.

La chambre basse du Parlement est même appelée à surseoir à l’adoption de cette proposition de loi en cas de persistance des controverses et des tensions politiques. Le Président de la République, en sa qualité de garant de la nation et de la stabilité nationale, est exhorté à faire valoir ses responsabilités au sujet de cette loi si celle-ci venait à être approuvée par les deux Chambres du Parlement, afin de préserver la paix, l’unité et la cohésion nationale.