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Centrafrique : le procès de deux ex-miliciens à la CPI fixé au 9 février 2021

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Centrafrique : le procès de deux ex-miliciens à la CPI fixé au 9 février 2021

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Ces ex-miliciens sont poursuivis pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité
Par GKM

L’annonce faite par la Cour pénale internationale (CPI) le 16 juillet 2020, annonçant le début imminent du procès de deux chefs de milice centrafricains pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, est perçue par Human Rights Watch comme un pas important pour que justice soit faite sur lesdits crimes.

Selon la Cour de la Haye, le procès de Patrice-Édouard Ngaïssona et d’Alfred Yekatom débutera le 9 février 2021.
Dans une vidéo (sous-titres en français et en anglais) d’une durée de 53 minutes, Ngaïssona évoque son expérience au sein des milices anti-balaka, les attaques contre des civils dans les villes de Bossangoa et Bambari, ainsi que le rôle qu’il a joué dans les négociations visant à mettre fin au conflit.

 » La population centrafricaine a subi des atrocités et horreurs indescriptibles lors du conflit civil qui avait commencé en 2012 « , a déclaré Elise Keppler, directrice adjointe du programme Justice internationale de Human Rights Watch.  » Pour les victimes et leurs familles, il est crucial que se tiennent des procès équitables et crédibles contre les personnes impliquées dans les pires de ces crimes ; ce sera un volet indispensable du processus permettant de rompre les cycles d’impunité qui apportent tant de violence dans le pays. « , renchéri-t-elle.

Parmi les charges qui pèsent contre Ngaïssona et Yekatom, figurent des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité en lien avec des incidents survenus entre décembre 2013 et décembre 2014.
Ngaïssona a été arrêté en France et transféré à la CPI le 12 décembre 2018. Yekatom a été transféré à la CPI par les autorités de la République Centrafricaine le 17 novembre 2018.

Tout a commencé en 2013

À partir de 2013, les combats entre la Séléka, coalition rebelle composée principalement des musulmans du nord-est de la RCA, et des milices chrétiennes et animistes peu organisées appelées anti-balaka, ont déplacé des centaines de milliers de personnes.

À ce moment-là, note HRW, la Séléka avait pris le contrôle du pays. Les combattants anti-balaka qui, au départ, menaient des contre-attaques contre la Séléka, se sont très vite livrés à des attaques effroyables contre des quartiers musulmans, mettant souvent sur le même plan les civils musulmans et les membres de la Séléka.

Dans la vidéo, Ngaïssona ne remet pas en question la responsabilité des milices anti-balaka dans certains abus, mais il maintient que ceux qui les ont commis n’en faisaient pas tous partie. À propos des anti-balaka, il met leurs actes sur le compte de la  » révolution populaire « , affirmant que les Centrafricains ont  » le droit de se révolter pour défendre leur patrie « .

Sans contester qu’il faisait partie des chefs des milices anti-balaka, il déclare par ailleurs que ce groupe ne devrait pas être exclusivement ciblé pour ses abus, et que  » c’est la population centrafricaine qui s’est révoltée « .
Ngaïssona affirme également qu’il disciplinait les membres des anti-balaka.  » [M]a présence a dilué beaucoup de choses, a discipliné ces enfants […]. J’ai pris d’énormes risques au milieu de ces enfants, [leur disant] ‘ne pas faire ça, fais ça, fais ça’. « , déclarait le chef rebelle.

Selon lui, il s’efforçait d’obtenir la paix en République centrafricaine.

 » [L]e travail que je fais, c’est dans le sens d’amener l’apaisement. Les hommes m’ont diabolisé au départ. Mais aujourd’hui ils savent que non, ce n’est pas la personne qu’on a diabolisée. Moi, ma mission, c’est d’amener ce pays-là à retrouver sa place, à trouver la paix. Et […] je souhaiterais revivre avec mes frères, ensemble. « , rencherie-t-il.

Il note qu’il était en contact régulier avec des leaders de la Séléka, notamment avec Mohamed Moussa Dhaffane, qui était ministre des Eaux et Forêts lorsque la Séléka était au pouvoir. Pour des raisons de sécurité et afin de protéger l’identité de plusieurs personnes intervenant dans la vidéo, leur image est floutée et leur voix remplacée par celle d’un acteur.

RCA, pays sous contrôle des groupes armés !

Même si la violence a diminué en République Centrafricaine depuis l’entretien avec Ngaïssona, qui se tenait en 2014, près de 75 % du pays sont toujours contrôlés par des groupes armés. Ces groupes continuent à attaquer et maltraiter des civils ; ils attaquent même les casques bleus des Nations Unies, selon HRW.

Les auteurs de ces crimes graves n’étant pas forcés de rendre des comptes, cela favorise ces violences, constate l’organisation américaine de défense et de promotion des droits de l’homme. Lors d’un accord de paix de 2019, des groupes armés ont tenté d’inclure une amnistie ; certains de leurs chefs considèrent d’ailleurs que toute tentative de les tenir pour responsables de crimes graves s’oppose à l’esprit des accords.

Il existe actuellement 684 000 personnes déplacées au sein de la République centrafricaine et 617 000 réfugiés centrafricains dans les pays de la région. Beaucoup de ces personnes sont déplacées depuis 2013. La République centrafricaine a établi une Cour pénale spéciale dans la capitale, Bangui, afin de juger, au côté de la CPI, les crimes internationaux graves commis lors du conflit. Ce tribunal fonctionne en partenariat avec l’ONU et comprend des juges et procureurs de la communauté internationale, qui travaillent avec des professionnels de la justice de la République centrafricaine.

La Cour est opérationnelle depuis 2018 et des enquêtes sont en cours. Elle devrait recevoir un soutien international accru afin de continuer son travail, a déclaré Human Rights Watch.
 » Les conflits en République centrafricaine ont été marqués par l’impunité quasi totale des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité « , a conclu Elise Keppler.  » Les procès de Ngaïssona et de Yekatom – et, nous l’espérons, d’autres bientôt – aideront à établir les faits et à déterminer les responsabilités de ces crimes.

La justice aidera à ouvrir un nouveau chapitre pour la République centrafricaine, fondé sur le respect de l’état de droit. « , conclut HRW.

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