Inga III : des Congolaises exigent l’implication des communautés locales
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Dans le cadre de leur plaidoyer, elles dénoncent le manque d’informations ayant conduit au processus de négociation, signature d’Accords et autres débats relatifs à la mise en œuvre de ce projet
Par GKM
Les femmes congolaises, encadrées par l’organisation « Femmes Solidaires »(FESO) ont, au terme de leur atelier de trois jours, organisé à Kinshasa, entamé des actions de plaidoyer et de lobbying auprès des autorités congolaises, afin de « voir clair » à propos du projet Inga III, dont elles dénoncent le manque d’informations.
Dans un mémorandum adressé au chef de l’Etat, avec copie pour informations aux ministères du Genre, Famille et Enfants, de l’Energie et à l’Agence de Développement et la Promotion du projet Inga(ADPI), ces personnes constatent qu’elles ne sont pas associées, de près ni de loin, à tous les processus de négociation, signature d’Accords et autres débats relatifs à la mise en œuvre du projet Inga III.
Ces femmes membres du FESO ont pris d’assaut le bureau de Bruno Kapandji Kalala, chargé de mission de ce projet, durant quatre heures, pour avoir les informations à la source et dénoncer cette opacité. Pour elles, le processus ayant abouti à la signature du projet Inga III, tel que mené à ce jour, ne respecte pas les droits des femmes, garantis par les lois et traités internationaux ratifiés par la RDC. A en croire Mme Mignone Mbombo, chargée de Programmes chez FESO, les droits des femmes au consentement libre préalable et éclairé, à la consultation, à la participation des femmes à la gestion de ressources naturelles sont systématiquement violés dans ce méga projet Inga III.
Dans ces démarches, ces femmes exhortent l’Etat congolais à bien jouer son rôle de protecteur des populations civiles et de leurs biens. Tout en réaffirmant leur opposition catégorique à la construction d’Inga III, elles estiment dans leur mémorandum adressé aux autorités que ce projet va renforcer l’état macabre dans lequel se trouve les habitants d’Inga et les villages environnants, meurtris par les précédentes constructions ayant causées la délocalisation physique et économique des populations.
Ces requérantes réclament que ce processus s’accompagne de la relocalisation, de compensations et d’indemnisations en faveur des populations. Elles déplorent le fait que les promesses faites aux communautés locales lors de la construction des barrages d’Inga I et II n’ont jamais été tenues et que rien ne prouve qu’elles le seront pour Inga III. Pour elles, au lieu de construire Inga III, il faut déjà commencer par réhabiliter Inga I et II.
Mettre en place un mécanisme d’accès à l’information
Les signataires du mémo invitent les autorités à prendre en compte les femmes comme parties prenantes et interlocutrices à toutes discussions et négociations sur le projet Inga III. Dans leur cahier des charges, les femmes membres de FESO exigent la mise en place d’un mécanisme devant permettre et faciliter l’accès à toutes les information sur le projet Inga III , à toutes les femmes et singulièrement à celles d’Inga et des villages environnants.
Pour elles, la mise en œuvre de ce projet affectera négativement les droits des populations riveraines d’Inga vivant dans les villages Kilengo, Lundu, Lubwaku, Camps Kinshasa et Nvuzi III et dénoncent l’absence d’un plan de délocalisation et de réinsertion de ces populations. « Rappelons que l’intangibilité des terres d’Inga et villages environnants , héritage des ancentres . Nul ne peut s’en servir en violation des droits d’accès à la terre de communautés locales et singulièrement des femmes », grondent-elles.
C’est ainsi qu’elles exigent également la mise sur pied d’un dialogue inclusif et permanant entre communautés locales et autorités Congolaises, afin d’opter pour les alternatives énergétiques non polluantes. Mme Salomé Elolo, directrice exécutive de FESO, craint que ce projet puisse impacter l’agriculture et la pêche, les flux migratoires dans Inga et les villages environnants, au risque de créer une crise non contrôlée et des conflits inter–ethniques. Il y a aussi risque de déculturation, changement climatique par les inondations, l’extrême pauvreté et la faim.
Méga projet de 14 milliards de dollars
En effet, le gouvernement congolais avait annoncé, le 16 octobre 2018, la signature d’un « accord de développement exclusif » avec deux entreprises chinoise et espagnole, pour tenter de financer le projet de barrage d’Inga III sur le fleuve Congo, d’une capacité de 11 000 mégawatts. Ce projet est estimé à 14 milliards de dollars (12,1 milliards d’euros). Mais l’accord a été signé entre la RDC et les groupements des entreprises « Chine Inga III » et « ProInga », selon un communiqué de la Présidence congolaise sous Joseph Kabila daté d’il y un an.
Chine Inga III est emmené par China Three Gorges Corporation (gestionnaire du gigantesque barrage des Trois-Gorges, en Chine). ProInga est conduit par Cobra Instalaciones y Servicios, filiale du groupe de BTP espagnol ACS, dirigé par Florentino Pérez, également connu comme président du Real Madrid.
Mais les organisations de la société civile estiment quant à elles que le projet Inga III risque de plonger le pays dans une situation de dettes, en exportant l’énergie indispensable à l’extérieur du pays. Cela, alors que les citoyens congolais recevront trop peu ou pas d’énergie, mais en permettant aux investisseurs internationaux d’en récolter les bénéfices.