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Kasaï: l’ONU nomme trois experts vertébrés

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Kasaï: l’ONU nomme trois experts vertébrés

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Il s’agit du Sénégalais Bacre Ndiaye, du Canadien Luc Côté et de la Mauritanienne Fatimata M’Baye qui travailleront en   collaboration avec la justice congolaise, afin de faire toute la lumière sur les graves violations des droits de l’homme survenues dans cette région de la RDC

Le Haut-commissaire des Nations-Unies aux droits de l’homme, M. Zeid Ra’ad Hussein, a nommé depuis hier mercredi 26 juillet 2017 trois experts internationaux devant travailler aux cotés des autorités congolaises, afin de mener des investigations sur les violences meurtrières qui ont embrasé le Kasaï, région de la RDC où l’on a aussi découvert près de 80 fosses communes.  Les trois experts internationaux nommés sont notamment le Sénégalais Bacre Ndiaye, le Canadien Luc Côté et la  Mauritanienne Fatimata M’Baye.

Selon le communiqué  publié à ce sujet par le Haut-Commissaire des Nations Unies, le Sénégalais Bacre Ndiaye assumera la fonction de président au sein de cette équipe d’experts. La création de cette équipe d’experts internationaux a été faite conformément à une Résolution prise le 22 juin 2017 par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies.

Dans cette Résolution, le Conseil s’est déclaré vivement préoccupé par les informations faisant état d’ «  une vague de violences, de violations et d’abus graves et flagrants des droits de l’homme et de violations du droit international humanitaire dans la région du Kasaï».

La Résolution fait notamment référence à des informations relatives «  au recrutement et à l’utilisation d’enfants soldats, à des violences sexuelles et basées sur le genre, à la destruction de maisons, d’écoles, de lieux de culte et d’infrastructures étatiques par des milices locales ainsi qu’à l’existence de  fosses communes ».

Déterminer les faits et les circonstances sur les allégations de violations des droits de l’homme et du DIH

Dans cette Résolution, le Conseil des droits de l’homme demande à l’équipe d’experts mise sur pied «  de collecter, préserver les informations, et de déterminer les faits et les circonstances sur les allégations de violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire  dans la région du Kasaï conformément aux normes et aux pratiques internationales, tout en assurant la protection de toutes les personnes qui collaboreront avec l’équipe, en coopération avec le gouvernement de la République démocratique du Congo, notamment en facilitant les visites et l’accès au pays, aux sites et aux personnes ».

La résolution demande en outre aux experts de «  transmettre les conclusions de l’enquête aux autorités judiciaires de la République démocratique du Congo, afin d’établir la vérité et de faire en sorte que tous les auteurs de ces crimes lamentables rendent des comptes aux autorités judiciaires de la République démocratique du Congo ».

Le Haut-commissaire Zeid Ra’ad Al Hussein fera une présentation orale sur la situation dans la région du Kasaï au Conseil des droits de l’homme, à l’occasion de la 37ème session du Conseil prévue en mars 2018. Et un rapport complet sur les conclusions de l’équipe sera présenté en juin 2018, à l’occasion de la 38ème session du Conseil.

La mission de vérité

La nomination de cette équipe d’experts internationaux est saluée par tous ceux qui réclament que toute la lumière soit faite sur les violences survenues au Kasaï et les conséquences dramatiques de celles-ci sur les populations civiles. Mais, la question que plusieurs observateurs se posent est celle de savoir si les trois experts internationaux auront l’accès facile  sur les sites  où jusqu’à ce jour l’ONU a répertorié plusieurs de 80 fosses communes au Kasaï.

Surtout quand on se souvient qu’en 1998, l’avocat chilien Roberto Garreto, alors expert indépendant sur les situations des droits de l’homme en RDC, avait été empêché de mener les enquêtes sur les massacres des refugiés hutus rwandais imputés aux troupes de l’Alliance démocratique pour la libération du Congo(AFDL) sous le règne de Laurent Désiré Kabila.

Il convient aussi de rappeler que dans les violences meurtrières au Kasaï, deux experts des Nations Unies qui enquêtaient sur les graves violations des droits de l’homme dans la région ont été assassinés sur l’axe Bukonde –Tshimbulu. Il s’agit de l’Américain Michael Sharp et de la suédoise Zaida Catalan.

Quant à leurs accompagnateurs congolais dont deux conducteurs de moto et un interprète, ils restent introuvables jusqu’à ce jour. Tout porte à croire que l’équipe d’experts internationaux que va conduire Bacre Ndiaye tentera aussi de faire toute la lumière sur les circonstances de la mort de Michael Sharp et Zaida Catalan ainsi que leurs accompagnateurs.

Des enquêteurs vertébrés

En confiant cette mission d’enquête aux trois experts internationaux, Zeid Ra’ad Al Hussein connait certainement la compétence et le profil de ces derniers. En effet, Bacre Ndiaya, président de l’équipe,  a occupé plusieurs fonctions au HDCH à Genève et à New York, de 1998 à 2014.

De 1992 à 1998, cet expert a été Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, survenues en ex-Yougoslavie (1992). Il a également fait partie de  la Commission d’enquête internationale sur les crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis au Rwanda (1993 et 1994) et en Papouasie-Nouvelle-Guinée (1995).  Entre 1082 et 1998, Bacre Ndiaye a été également membre de l’Ordre des avocats du Sénégal où il a occupé le poste de Secrétaire général pendant huit ans (1983-1991). Et en 1995, il a été nommé à la Commission « Vérité et justice » en Haïti.

Quant au Canadien Luc Côté, son profil indique qu’il est avocat pénaliste depuis près de 30 ans, plus particulièrement spécialisé en droit pénal international. Expert en matière de justice transitionnelle, il a occupé les fonctions de conseiller juridique principal au Tribunal pénal international pour le Rwanda (de 1995-1999), et de Directeur des poursuites criminelles pour le Tribunal spécial de la Sierra Leone de 2003-05. En 2006, il était directeur exécutif de la Commission spéciale d’enquête indépendante pour le Timor-Leste.  Cet expert a également eu à assurer la coordination de l’exercice de cartographie des Nations-Unies en RDC (2008-10).

Il a aussi participé à la Commission d’enquête internationale indépendante pour le Kirghizistan (2011), et coordonné le programme de soutien de l’état de droit pour la Mission des Nations Unies à Haïti (2015-16). Luc Côté a également collaboré à des projets au Kenya, en Somalie, en République centrafricaine, en Bosnie, en Haïti et au Liban.

Concernant la Mauritanienne Fatimata M’Baye, elle est Vice-présidente de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), Présidente de l’Association mauritanienne des droits de l’homme et siège au Conseil de l’Institut de la société civile de l’Afrique de l’Ouest. En 1999, elle a été la première africaine à recevoir le Prix international Nuremberg des droits de l’homme pour son action en faveur des droits de l’homme en Afrique.

Mme M’Baye a également participé à la Commission d’enquête internationale sur la Côte d’Ivoire et à la Commission d’enquête sur la République centrafricaine en 2014. Elle siège au Conseil du Fonds de contributions volontaires pour la coopération technique dans le domaine des droits de l’homme.

Elle préside la Commission des droits des femmes de l’Association mauritanienne des droits de l’homme et fait fonction d’avocate-conseil pour « Terre des Hommes «, apportant une aide juridique aux mineurs accusés d’infractions pénales.

Par Godé Kalonji

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