Suite à la lenteur de l’enquête nationale : L’ONU prête à saisir la CPI sur les tueries du Kasaï
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Le Haut-commissaire des Nations Unies pour les Droits de l’homme, Zeid Ra’ad Al Hussein renouvelle son appel à l’ouverture d’une enquête nationale indépendante et transparente sur les massacres perpétrés au Kasaï
Dans une déclaration faite hier mercredi 19 avril 2017 à Genève, en Suisse, le Haut-commissaire des Nations Unies aux Droits de l’Homme a condamné les violences et les tueries au Kasaï . Zeid Ra’ad Al Hussein a, au même moment, menacé de solliciter l’intervention de la Cour pénale internationale (CPI) au cas où une enquête nationale sérieuse ne serait pas diligentée pour poursuivre toutes les parties impliquées dans les violences.
« Il est absolument essentiel que le Gouvernement de la RDC prenne des mesures significatives, qui ont jusqu’à présent échoué, afin d’assurer une enquête rapide, transparente et indépendante pour établir les faits et les circonstances des violations présumées des droits de l’homme et des abus commis par toutes les parties, et d’autres abus de justice.
Mon Bureau a offert son aide pour mener une enquête aussi crédible. Nous réitérons notre demande d’accès à tous les sites de fosses communes, ainsi qu’à tous les témoins, y compris ceux qui sont en détention, et d’autres informations pertinentes nécessaires pour déterminer la responsabilité à tous les niveaux. L’ampleur et la nature de la violence soulignent de plus en plus la nécessité de suivre de près la situation.
S’il n’y a pas d’enquête nationale efficace, je n’hésiterai pas à exhorter la communauté internationale à soutenir une enquête par un mécanisme international, y compris la Cour pénale internationale, qui a récemment rappelé aux autorités de la RDC leur responsabilité principale en vertu du Statut de Rome d’enquêter et de poursuivre les actes de violence allégués au Kasaï », a déclaré Zeid Ra’ad Al Hussein.
Environ 40 fosses communes découvertes depuis Août 2016
Selon les Nations Unies à travers le Bureau Conjoint des Nations Unies aux Droits de l’homme(BCNUDH), environ 40 fosses communes ont été découvertes au Kasaï depuis le début du conflit en aout 2016. D’après les enquêteurs de l’ONU, les forces de l’ordre et sécurité congolaises seraient responsables de certains cas de violations de droits de l’homme.
« L’équipe des Nations Unies a recueilli des informations selon lesquelles des soldats des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) auraient creusé des tombes, après s’être heurtés à des éléments présumés de la milice Kamuina Nsapu du 26 au 28 mars. Au moins 74 personnes, dont 30 enfants, auraient été tuées par des soldats à la suite de ces affrontements. L’équipe de l’ONU a également visité Kananga pour recueillir des informations sur les abus et les violations présumées là-bas.
Entre le 28 et 30 mars, les soldats des FARDC auraient tué au moins 40 personnes, dont 11 enfants et 12 femmes, dans la commune de Nganza à Kananga et blessé au moins 21 autres. La majorité des victimes auraient été tuées dans leurs foyers alors que des soldats se rendaient à la recherche de membres de la milice », a déploré le Haut-commissaire des Nations Unies aux Droits de l’Homme.
La milice Kamuina Nsapu non épargnée
Il a accusé la milice Kamuina Nsapu d’avoir violé systématiquement les droits de l’homme, notamment dans des cas de recrutements des enfants. « La milice de Kamuina Nsapu, qui est fidèle à un chef coutumier local tué par l’armée le 12 août de l’année dernière, a été accusée de recruter des centaines d’enfants dans ses rangs et de cibler les agents et symboles de l’État, y compris les locaux du gouvernement, les écoles, les hôpitaux, les postes de police, ainsi que les églises.
Un exemple d’une telle violence s’est produit le 30 mars, alors qu’une trentaine de miliciens présumés de Kamuina Nsapu ont attaqué l’église paroissiale de Saint-Jean-de-Masuika dans le territoire de Luiza, où ils ont maltraité au moins trois religieuses et un prêtre menaçant de les tuer.
De plus, le prêtre et l’une des religieuses auraient été enlevées et relâchés le lendemain après que l’argent ait été payé. Les miliciens ont également vandalisé l’église, brisant les portes et les fenêtres, et brûlant les chasubles du prêtre », a rapporté Zeid Ra’ad Al Hussein.
Depuis août 2016, le Kasaï est paralysé par des combats qui opposent les forces de l’ordre et de sécurité aux miliciens Kamuina Nsapu. Cette crise a déjà causé la mort de centaines de personnes et provoqué de nombreux cas des déplacements internes des populations, fait savoir l’ONU qui a perdu deux de ses experts venus dans la région pour enquêter sur les cas des violations des Droits de l’homme.
547 cas d’atteinte au mois de Mars 2017
De son coté, le Bureau Conjoint des Nations-Unies aux Droits de l’Homme (BCNUDH) a documenté 547 cas de violation des Droits humains commis à travers le pays durant le mois de mars 2017. Il s’agit d’un rapport mensuel sur la situation des Droits de l’homme à travers la RDC que le BCNUDH publie conformément à son mandat lui confié par le Conseil de sécurité des Nations Unies.
D’après le BCNUDH, les atteintes à la liberté et à la sécurité des personnes sont récurrentes avec un total de 184 violations et 133 cas d’atteintes à l’intégrité physique des personnes. Les agents de l’Etat et les groupes armés sont les plus incriminés par l’ONU dans ces violations de Droits de l’homme.
«Les agents de l’Etat responsables de 59% de violations, 66 victimes d’exécutions extrajudiciaires, groupes armés responsables de 221 violations dans les territoires affectés par les conflits, 117 civils tués dans les territoires affectés par les conflits dont 35 par les groupes armés, 33 adultes et 15 filles victimes de violations sexuelles liées au conflit, dont 16 par les agents de l’Etat », a indiqué le rapport mensuel de BCNUDH.
Le BCNUDH note une légère hausse de cas de violations des droits de l’homme en mars par rapport au mois de février 2017 où 461 cas ont été répertoriés par cette agence onusienne.
Par Godé Kalonji