Face à la montée de violences à travers la RDC : FIDH pour le renforcement de moyens d’action de la MONUSCO
Partager
Le Conseil de sécurité et l’Union européenne appelés à pousser le gouvernement de la RDC à respecter le calendrier électoral et mettre en œuvre l’Accord du 31 décembre 2016
Le mercredi 29 mars 2017, le Conseil de sécurité des Nations unies votera une Résolution sur le possible renouvellement du mandat de la Mission de l’Organisation des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO).
En amont de ce vote, la Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’homme(FIDH) et ses trois organisations membres en RDC à savoir, la Ligue des Électeurs (LE), le Groupe Lotus (GL) et l’Association africaine des droits de l’Homme (ASADHO)ont publié le lundi 27 Mars 2017 une note de position qui dresse un constat alarmant sur la situation sécuritaire et politique du pays. Dans ce dossier, FIDH documente l’intensification des violences et des violations commises par différents groupes armés et détaille la répression en cours et ses effets.
Alors que des élections sont prévues en décembre 2017 conformément à l’Accord du 31 décembre 2016, la détérioration continue de la situation depuis l’été 2016 laisse craindre un embrasement généralisé. C’est ainsi que ces organisations exhortent le Conseil de sécurité à renouveler le mandat de la MONUSCO et à renforcer ses moyens d’action.
Face à l’augmentation des violences et compte tenu de l’incapacité des FARDC à protéger les populations civiles victimes des massacres et pillages, ses capacités d’action doivent être renforcées, martèle la Fédération internationale des Ligues des Droits de l’homme.
Parallèlement au maintien et au renforcement de la MONUSCO, la Ligue des Electeurs, le Groupe Lotus et l’Association africaine des droits de l’Homme (ASADHO) recommandent l’adoption de mesures complémentaires afin de juguler les flambées de violences et permettre l’alternance démocratique. Elles invitent les Etats membres du Conseil de sécurité et de l’Union européenne à pousser le gouvernement de la RDC à respecter le calendrier électoral et mettre en œuvre l’Accord du 31 décembre 2016.
Ces organisations pensent que des mesures de sanctions individuelles supplémentaires, dans la foulée de celles adoptées par l’Union européenne et les Etats-Unis en décembre 2016, doivent être prises pour sanctionner ceux qui s’opposent au processus politique et à la paix ainsi que les principaux responsables de récentes violations graves des droits humains.
Violences au Kasaï et graves violations des droits de l’homme
Dans cette note de position intitulée « RDC : Faire face aux flambées de violences et aux troubles politiques afin de garantir l’alternance démocratique », la FIDH et ses trois organisations membres en République démocratique du Congo (RDC) analysent la situation sécuritaire et politique explosive qui règne dans le pays.
La note documente de nombreux affrontements et violations des droits humains commises par des membres des Forces armées congolaises (FARDC) et des groupes armés actifs dans le Nord-Kivu et les provinces des Kasaï. Les violences se sont intensifiées ces derniers mois, faisant des centaines de victimes civiles dans ces régions. De graves violations des droits humains y ont été recensées, dont des assassinats, enlèvements, le recrutement d’enfants soldats, des actes de violence sexuelle et des pillages et incendies de plusieurs dizaines de villages.
Depuis l’éclatement de violences à grande échelle dans la région du Kasaï en Août 2016, plus de 400 personnes ont été tuées et plus de 200 000 personnes déplacées de chez elles, selon l’ONU. Des Ongdh comme Human Rights Watch ont reçu des informations faisant état d’un grand nombre de personnes tuées au cours de dernières semaines.
Les violences ont augmenté après que les forces de sécurité aient tué Kamuina Nsapu, l’héritier apparent du trône d’une chefferie dans la région de Tshimbulu, en Août.
Depuis sa mort, la milice portant son nom est devenue un mouvement populaire plutôt qu’un groupe armé organisé doté de structures de commandement claires. Certains membres de la milice ont ajouté leurs revendications à la crise politique nationale, appelant le président Kabila à quitter ses fonctions, son deuxième et dernier mandat autorisé par la constitution ayant pris fin le 19 décembre 2016.
Les membres de la milice Kamuina Nsapu croient en des pouvoirs magiques qui, disent-ils, les rendent invulnérables aux balles. Munis de bâtons et d’autres armes rudimentaires, des membres de la milice ont attaqué des forces de sécurité et certains bâtiments gouvernementaux dans les provinces du Kasaï, du Kasaï-Central, du Kasaï-Oriental, du Sankuru et de Lomami.
Des forces de sécurité ont parfois répondu à la milice avec une force excessive, tirant sans nécessité sur des membres ou des partisans présumés de la milice, notamment des femmes et des enfants, selon le rapport des ONGDH comme HRW.
Plus de deux douzaines de fosses communes ont été signalées dans trois provinces du Kasaï depuis janvier. Cinq vidéos sont apparues à propos de la région du Kasaï ces dernières semaines, montrant des soldats tirant sur des membres de la milice désarmés ou peu armés, notamment de nombreuses femmes et enfants.
Persistance de blocage et de tensions politiques
Par ailleurs, et en dépit de l’Accord politique signé le 31 décembre 2016 et censé amener le pays vers des élections présidentielle, législatives et provinciales d’ici la fin 2017, la répression des voix engagées dans le combat démocratique se poursuit, dénonce FIDH dans un rapport.
« Si les autorités ont procédé à des libérations dans le cadre des mesures dites de «décrispation», de nombreux défenseurs des droits humains et des opposants politiques continuent d’être arrêtés, détenus, ou font l’objet de menaces de mort et de harcèlement judiciaire », tance la FIDH. Cette organisation internationale regrette que les manifestations continuent d’être empêchées ou interdites, et certains médias et journalistes sont toujours réduits au silence.
La fédération s’inquiète de constater que le processus politique enclenché par l’Accord s’est, depuis, enlisé.
Dans ce contexte, et à neuf mois des élections annoncées, le renouvellement du mandat de la MONUSCO apparaît une absolue nécessité pour protéger les populations civiles et accompagner le processus électoral, a fait remarquer l’ONGDH.
FIDH note qu’au cours de la deuxième moitieì de l’année 2016 et du début de l’année 2017, la situation politique, sécuritaire et des droits humains s’est gravement détériorée dans de nombreuses provinces du pays faisant craindre un embrasement aÌ neuf mois de la tenue des élections, d’abord reportées et maintenant prévues pour décembre 2017.
Une main noire de Kinshasa dénoncée
A la violence armée aÌ l’est et aux flambées de violences localisées dans les régions centrales du pays, viennent s’ajouter la poursuite de la répression des voix contestataires et la restriction accrue de l’espace démocratique.
La Fédération estime que cette déstabilisation de plus en plus généralisée semble en partie encouragée et instrumentalisée par les autorités congolaises dans le but de repousser aÌ nouveau l’organisation des élections et de conserver le pouvoir. Pour la FIDH, la tenue des élections dans les délais prévus est pourtant primordiale pour éviter que le pays ne sombre dans le chaos.
Par Godé Kalonji