Matadi : Qui Sauvera le Port de l’Ex. Onatra ?
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Jadis l’un des principaux poumons de l’économie de la République Démocratique du Congo à l’instar de la Gécamines, le Port International de Matadi placé depuis des lustres sous la gestion et la supervision de la Société Commerciale des Transports et des Ports (ex. Onatra) traverse des moments de plus en plus difficiles qu’il n’a jamais connu depuis son existence.
Et si l’on y prend garde dès à présent, pensent de nombreux observateurs avertis, il risquerait non seulement de fermer ses quais mais aussi et surtout de péricliter avec sa cohorte de malheurs vis-à-vis de ses milliers d’agents et travailleurs aujourd’hui clochardisés qui ne savent plus à quel saint se vouer. Ce qui, toutefois, n’est pas le souhait de l’opinion publique.
Mais à voir la situation qui y prévaut à ce jour, il y a lieu d’interpeller, sans plus tarder, les décideurs pour qu’ils y apportent au plus vite une cure d’âme. C’est aussi le vœu le plus ardent de toute la population de la province du Kongo Central, en général, et de la ville portuaire de Matadi, en particulier.
Que se passe-t-il réellement au sein du Département des ports maritimes de la SCTP à Matadi ?
En effet, d’aucuns n’ignorent que la survie de cet important port maritime congolais dépend, en premier, des activités liées à l’import et à l’export. Il se fait malheureusement que depuis les deux premiers mois de l’année en cours, lesdites activités, contre toute attente, ont sensiblement baissé. La dégringolade que subissent au jour le jour les marchandises en conventionnelle explique cette situation à la fois déplorable et inquiétante.
Notez : à l’importation, cette baisse est évaluée à 41 % contre 28 % à l’exportation. Des taux de baisse jamais connus depuis l’époque coloniale. Ce n’est pas tout. En ce qui concerne le Terminal Containeurs de Matadi qui fonctionne dans l’enceinte des installations portuaires de la SCTP, la situation laisse plus d’un observateur quelque peu perplexe. Très peu de containeurs seulement y sont encore perceptibles.
Alors qu’il y a à peine deux ans, aucun espace vide ne se faisait voir çà et là dans ce terminal du reste maintes fois soumis à l’époque aux opérations de désengorgement suite à ses encombrements à répétition. Bref, pour ce qui est des containeurs, le Port de Matadi a perdu 60 % de ses importations contre 66 % de ses exportations.
Et pour cause !S’exprimant sous le couvert de l’anonymat, les quelques responsables du Département des ports maritimes approchés par notre rédaction provinciale n’ont pas cependant mâché les mots en pointant un doigt accusateur en direction de l’Etat congolais qui, selon eux, serait à la base de la situation loufoque que traverse leur société pour l’avoir délibérément abandonné à son triste sort.
Pour preuve, en lieu et place de protéger l’industrie locale, dénoncent-ils sans réserve, l’Etat Congolais, en complicité avec certains opérateurs économiques originaires de la province du Kongo Central, se serait permis le luxe d’aller en guère contre les intérêts de la SCTP (ex. Onatra) confrontée aujourd’hui à une concurrence déloyale pour avoir créé, bon gré malgré, une autre entreprise similaire ayant dans ses attributions la gestion du Port MGT communément appelé » Port Ledya » ; mettant ainsi à genoux la SCTP qui, malheureusement, ne sait plus sur quel pied se tenir encore.
Car, la plupart des transactions liées à l’import et à l’export et pour lesquelles le Port de la SCTP détenait autrefois seul le monopole passent désormais par ce port nouvellement construit proche du pont Maréchal en aval du Fleuve Congo et lequel attire de plus en plus de nombreux opérateurs portuaires qui ne jurent que par ce port disposant en sus des engins de manutention sophistiqués par rapport à celui de la SCTP (ex. Onatra) dont les engins laissent à désirer.
Autres principales causes de la baisse du volume des importations et des exportations au port de Matadi sont notamment, d’après les responsables dudit département, le ralentissement de l’activité économique sur l’ensemble du territoire national et surtout l’environnement politique actuel aggravé par le blocage observé dans la mise en œuvre de l’Accord politique du 31 décembre 2016 qui, soutiennent ces derniers, ne rassure pas les opérateurs économiques tant nationaux qu’étrangers.
Ces derniers disent d’ailleurs avoir peur d’être victimes, les moments venus, de pillage de leurs diverses marchandises aussi bien à l’import qu’à l’export au vu du climat politique de l’heure en République Démocratique du Congo. Raison pour laquelle ont-ils stoppé net tout mouvement à l’import et à l’export. D’où la nécessité impérieuse et l’urgence d’appliquer strictement cet accord afin de mettre en confiance les uns et les autres.
Par ailleurs, la lenteur du système manutentionnaire au port de Matadi a été également évoquée par lesdits responsables qui en sont conscients. Toutefois, ont-ils reconnu, des efforts inlassables ont été fournis par la Direction Générale de la SCTP qui, pour pallier à ce fléau, a doté cette société des engins de manutention pimpant neufs.
Ceux-ci sont constitués entre autres de 65 élévateurs, 9 autogrues, 2 grumiers ainsi que de 4 élévateurs de grande capacité susceptibles de soulever chacun 16 T. Mais aussi curieux que cela puisse paraître, tous ces engins, ont-ils précisé, se trouvent à ce jour immobilisés au port de Matadi et ce, en attendant l’exonération sollicitée depuis plusieurs mois auprès du Gouvernement de la République pour leur dédouanement. A ce sur, aucune suite favorable de la part des décideurs quant à ce. Allez-y comprendre quelques choses.
Face à cette indifférence notoire de l’Etat congolais vis-à-vis des activités du Port Maritime International de Matadi longtemps agonissant, les analystes de tous bords qui suivent de très près l’évolution de cette situation ne comprennent pas pourquoi ce dernier, en sa qualité d’Etat propriétaire de la SCTP, n’arrive-t-il pas à octroyer ne serait-ce des moyens conséquents et autres facilités requises en faveur de cette entreprise publique afin de lui permettre de se maintenir et surtout de faire face à la concurrence déloyale lui imposée par ce port appartenant à des privés ?
Tout compte fait, l’opinion publique pense que le silence de l’Etat congolais sur cette question qui soulève présentement des vagues des mécontentements de la part de nombreux matadiens est jugé de complice et contribue éventuellement à la disparition lente mais sûre de la Société Commerciale des Transports et des Ports ayant pourtant fait la pluie et le beau temps. Car, il est vraiment inconcevable de voir l’ensemble du personnel de cette entreprise cumuler aujourd’hui plusieurs mois d’arriérés des salaires. Une situation du reste jamais vécue à l’époque.
Qui sauvera alors cette entreprise des griffes de ses fossoyeurs qui se recruteraient parmi certains tenants du pouvoir de la RD Congo ? La réponse à qui de droit.
Par Olivier Bilonda Kamwanya