24 ans de » démocratie » aux allures d’une dictature
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24 avril 1990 – 24 avril 2014
Après la tyrannie de Mobutu, le semblant de démocratie observée pendant la transition 1+4 a disparu, les droits de l’homme bafoués, la liberté de la presse en péril, l’opposition muselée, les Congolais de nouveau clochardisés
» Comprenez mon émotion ! « . Cela fait exactement 24 ans que cette phrase a été prononcée à la cité de la N’sele, avec émotion, par le maréchal Mobutu en sanglots, alors qu’il décrétait le multipartisme politique au Zaïre, suite à la pression de la communauté internationale et à la bousculade de l’opposition interne dirigée de main de maître par Etienne Tshisekedi Wa Mulumba et son parti, l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS).
Mobutu avait donc, contre toute attente, pris la décision de prendre congé du Mouvement populaire de la révolution (MPR), et s’est même retiré à Kawele, dans la province de l’Equateur, d’où il prenait désormais des décisions engageant la République. Déçus, ses proches collaborateurs savaient bien que l’avenir n’était plus en leur faveur, comprenant que le Maréchal vivait ses dernières années de règne.
Après ce discours historique, tous les Congolais ont jubilé, pensant que leur chosification était complètement terminée, et que la démocratie tant attendue n’était plus une utopie.
Comme premiers actes à impacte visible, c’était le port de la cravate, jadis interdite par le régime dictatorial, dans le cadre du » retour à l’authenticité » prôné depuis 1971. Plusieurs Congolais pensaient même que cette fameuse démocratie se définissait par le simple port de la cravate. Or, c’est le pouvoir par le peuple et pour le peuple.
Surprise, cette catégorie des Congolais n’a pas compris le retour » avec force » de la dictature après le 24 avril 1990. Aucune initiative pour organiser les élections libres et transparentes.
La conférence nationale tenue pour tirer les affaires de l’Etat au clair, a été suspendue par la volonté de Mobutu Sese Seko. Bien de leaders politiques qui exerçaient leurs activités au sein des partis ont été malmenées, maltraités, arrêtés, voire assassinés. La pensée unique était toujours à l’ordre du jour. Une télévision nationale au service du pouvoir, faisant la propagande pour le compte de » Mobutu le bâtisseur » 24h/24h.
Trop c’est trop ! L’Afdl de triste mémoire a sollicité l’appui du Rwanda et de l’Ouganda pour chasser ce dictateur considéré comme l’un de derniers dinosaures africains de cette époque.
Ainsi, après 32 ans au pouvoir, Mobutu, malade et affaibli, s’en est allé avec toute sa famille politique et biologique. Nous sommes en 1997, plus précisément le 17 mai.
C’était l’euphorie et la liesse dans les 9 provinces que comptait l’ex-Zaïre. Tout le monde a finalement dit que le Maréchal est parti avec sa dictature, et que Laurent-Désiré Kabila ramène la démocratie aux Congolais.
La dictature s’en va, vive la dictature !
Ce pour lequel Mobutu a été chassé, est aussitôt constaté dans le chef des dignitaires du nouveau régime. Au lendemain de sa prise du pouvoir, LD Kabila a suspendu toutes les activités des partis politiques, ce qui a été très mal apprécié par les opposants qui ont combattu le régime dictatorial à partir de l’intérieur du pays.
Après la dictature, une nouvelle dictature ! On a assisté à des exécutions sommaires, arrestations, enlèvements, tortures et relégations aux villages dont ont été victimes quelques personnalités politiques.
Après quatre ans de pouvoir, la durée d’un mandat dans plusieurs pays, LD Kabila est assassiné. Nous sommes le 16 janvier 2001. Il est succédé par Joseph Kabila, contrairement à ce que prévoyait la constitution en vigueur à cette époque. Le nouveau président promet de mettre fin à la guerre qui a déchiré la RDC en quatre morceaux, en réunissant tous les protagonistes à Sun City à travers le dialogue inter congolais pour un gouvernement d’union nationale.
Joseph Kabila a également promis d’organiser les élections auxquelles il ne participerait pas. Eh bien ! L’architecture monstre surnommée 1+4 a vu le jour. Un président et quatre vice-présidents avec un seul objectif, les urnes.
Contre toute attente, Kabila se porte candidat aux élections présidentielles en 2006. En face de lui, Jean-Pierre Bemba, tous deux en ballotage. Au deuxième tour, Kabila l’emporte, la population accuse la CEI de Malumalu de n’avoir pas respecté la réalité des urnes. Bemba conteste les résultats, la guerre éclate en plein centre-ville de Kinshasa. Pour le MLC, la victoire a été de son camp.
Le semblant de démocratie observée pendant la transition 1+4 a immédiatement disparu. Les droits de l’homme bafoués, la liberté de la presse en péril, l’opposition muselée, les Congolais de nouveau clochardisés.
Tous les regards étaient braqués vers 2011 pour espérer un changement, surtout que le leader de l’UDPS avait officiellement annoncé sa participation à ces scrutins. Pendant la campagne, plusieurs candidats à la course au fauteuil présidentiel étaient victimes de crocs-en-jambes. Le 28 novembre 2011, les Congolais vont élire leur président de la République. Kabila l’emporte pour la deuxième fois. Tshisekedi conteste et se considère comme président élu de la RDC. Il prête serment le 23 décembre 2011, deux jours après Kabila.
Aujourd’hui, il y a tentative de révision de la constitution pour toucher aux » fruits défendus » et donner un troisième mandat à l’autorité morale de la Majorité présidentielle.
Tout est mis en marche pour ce faire. Voilà, 24 ans après, l’état dans lequel se trouve la démocratie en République démocratique du Congo. Des prisonniers politiques remplissent les prisons du pays, des combattants de partis politiques de même, aucune manifestation autorisée pour dire » non » à la démarche des dirigeants.
Beaucoup de Congolais se sont exilés dans d’autres pays, estimant que la démocratie n’existe pas en République démocratique du Congo (RDC). Ceux de la diaspora sont considérés comme des ennemis n°1 du régime. Pour eux, les Congolais doivent savourer véritablement le délice de la démocratie, la vraie démocratie, avant de manifester leur sympathie au régime en place. Les richesses du pays doivent bénéficier à tout le monde pour que les Congolais vivent aisément et avec dignité. L’impunité doit être bannie, et l’instrumentalisation de la justice ne doit plus continuer.
Par Stone