L’Asadho s’insurge contre tout projet ayant trait à la révision de la Constitution
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Dans une lettre adressée aux diplomates accrédités à Kinshasa
Dans une correspondance adressée aux ambassadeurs accrédités en RDC le lundi 21 avril 2014, et dont La Tempête des Tropiques s’est procurée une copie, l’Association Africaine de défense des Droits de l’Homme (ASADHO) invite, par la voix de son président national, Me Jean-Claude Katende, les diplomates africains et occidentaux à s’impliquer pour faire échec à toute tentative de modifier la Constitution, comme l’envisage déjà le parti au pouvoir en République Démocratique du Congo. Dans sa démarche, l’Ongdh ASADHO sollicite l’implication des diplomates africains et occidentaux accrédités à Kinshasa, pour amener Joseph Kabila et sa majorité au respect de la Loi fondamentale et du principe de l’alternance au pouvoir.
Ci-dessous, l’intégralité de la lettre de l’Asadho adressée aux diplomates et publiée à la demande de nos lecteurs, en référence à un article paru dans notre édition d’hier mercredi 23 avril:
A son Excellence Monsieur l’Ambassadeur des Etats Unis d’Amérique ;
A son Excellence Monsieur l’Ambassadeur du Royaume de Belgique ;
A son Excellence Madame l’Ambassadeur de Grande Bretagne ;
A son Excellence Monsieur l’Ambassadeur de France ;
A son Excellence Monsieur l’Ambassadeur d’Afrique du Sud ;
A son Excellence Monsieur l’Ambassadeur de la République d’Angola ;
A son Excellence Monsieur l’Ambassadeur d’Allemagne ;
A son Excellence Monsieur l’Ambassadeur de la République du Congo ;
A son Excellence Monsieur l’Ambassadeur du Canada ;
A son Excellence Monsieur l’Ambassadeur de la Hollande ;
A son Excellence Monsieur l’Ambassadeur d’Espagne ;
A son excellence Monsieur l’Ambassadeur de l’Union Européenne.
A son Excellence Monsieur l’Ambassadeur de
Tanzanie
N/Réf : 030/ASADHO/JCK/FD/2014
Concerne : Nos préoccupations pour la République Démocratique du Congo.
Excellences Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Depuis 1991, l’Association Africaine de défense des Droits de l’Homme, ASADHO en sigle, travaille assidument à l’instauration d’un Etat de droit en République Démocratique du Congo. Notre combat pour cet Etat de droit est justifié par notre conviction qu’il est le seul Etat qui soit capable de garantir la sécurité aux citoyens, le développement démocratique des institutions, d’assurer la stabilité politique, la paix et la sécurité juridique des investissements tant nationaux qu’internationaux dans notre pays.
Pour voir cet Etat instauré dans notre pays, sans aucun doute, nous avons besoin de l’assistance de tous les partenaires tant bilatéraux que multilatéraux de la République Démocratique.
Raison pour laquelle nous nous adressons à vous pour que vos pays respectifs restent attentifs à ce qui se passe dans notre pays et puissent soutenir tous les démocrates, qu’ils soient de la majorité présidentielle, de l’opposition ou de la société civile, qui veulent que le Président Joseph KABILA respecte les principes de l’alternance politique inscrits dans notre constitution.
A ce sujet, les préoccupations que nous voulons partager avec vous concernent les points ci-après :
1. L’engagement de vos pays dans l’instauration de la paix et de la démocratie en République Démocratique du Congo.
S’il est vrai que certains Etats africains et occidentaux ont soutenu la rébellion conduite contre le Président MOBUTU par Monsieur Laurent Désiré KABILA, en 1996, il est aussi vrai que vos pays respectifs étaient impliqués à des différents niveaux pour que l’accord de Sun City soit signé, que le Gouvernement de transition soit mis en place et que les élections de 2006 soient organisées.
En regardant tous ces événements avec recul, il apparait que sans l’implication des partenaires bilatéraux et multilatéraux de la République Démocratique du Congo, les différents belligérants ne pouvaient ni négocier la paix ni accepter d’aller aux élections.
Loin de nous la pensée de croire ou de dire que tout ce que nos partenaires ont fait dans notre pays était sans reproche, mais il est certain que sans leur implication, le peu d’acquis démocratiques que nous avons aujourd’hui ne pouvait être réalisé. Sans trop nous préoccuper du passé, nous voulons que nos énergies respectives soient consacrées à travailler pour consolider la paix et la démocratie en République Démocratique du Congo.
Au tant vous avez contribué à l’accord de Sun City qui est à la base du développement démocratique actuel, nous vous demandons de vous impliquer aussi dans ce qui se passe aujourd’hui dans notre pour que le Président Joseph KABILA et la majorité présidentielle actuelle ne mettent pas en péril les acquis démocratiques auxquels vous avez énormément contribué.
2. La révision constitutionnelle et la suite du processus électoral
Excellences Mesdames et Messieurs les ambassadeurs,
L’éventuelle révision constitutionnelle qui tendrait à modifier certaines dispositions de la Constitution en instaurant le mode de vote indirect pour l’élection de certains responsables politiques dont le Président de la République nous inquiète énormément.
Notre inquiétude se fonde sur le fait que cette révision risquerait de donner la possibilité au Président Joseph KABILA de briguer un autre mandat alors qu’aux termes de la constitution en vigueur à ce jour, il ne peut plus.
En plus, ce mode d’élection au suffrage indirect des responsables politiques risquerait de favoriser le système d’achat de conscience et de corruption qui avait déjà caractérisé l’élection de certains sénateurs et gouverneurs des provinces par les Assemblées Provinciales sous la législature de 2006-2011. Ces pratiques ne peuvent que fausser le jeu démocratique en amenant au pouvoir des hommes et femmes affairistes, sans scrupules et incapables d’impulser la démocratie dans l’intérêt de tous.
La révision des dispositions de la Constitution actuelle qui garantissent l’alternance politique risquerait de plonger notre pays dans une autre crise politique alors que celle relative à l’élection de 2011 n’est pas encore résolue, d’une part, et donnerait raison à ceux qui pensent qu’en République Démocratique du Congo, il est impossible d’accéder au pouvoir par voie démocratique, il faut recourir aux armes, d’autre part.
Entant qu’organisation citoyenne, il est de notre devoir de vous écrire pour que vous puissiez faire tout ce qui est en votre pouvoir afin que la révision des dispositions de la constitution dont on parle ne porte pas sur les dispositions qui consolident la démocratie et favorisent l’alternance au pouvoir.
3. Y a-t-il une alternative au Président Joseph KABILA ?
Excellences Mesdames et Messieurs les ambassadeurs,
Plusieurs fois cette question nous a été posée par les partenaires de notre organisation. Nous pensons que c’est possible que vous puissiez aussi vous poser la même question.
Sans perdre de vue le fait qu’il est difficile de trouver dans la classe politique et dans la société civile beaucoup de dirigeants compétents et attachés aux valeurs démocratiques, il est toujours possible de trouver une femme ou un homme capable de poursuivre l’œuvre de développement démocratique et économique commencée par le Président Joseph KABILA.
En 2001, le Président Joseph KABILA lui-même n’était pas une personnalité politique en vue mais il a été désigné par les hommes politiques de l’époque pour conduire notre pays. Ceux qui pensaient qu’il ne tiendrait pas longtemps sont surpris de le voir conduire ce pays aux diverses réalités pendant 13 ans. Donc, il est toujours possible de trouver un autre Congolais, homme ou femme, capable de conduire le pays comme l’a fait le Président Joseph KABILA ou mieux que lui.
L’œuvre réalisée par le Président Joseph KABILA en République Démocratique du Congo ne sera jugée que par les historiens. Pour notre part, nous pensons qu’il doit se plier aux principes démocratiques en quittant le pouvoir en 2016.
En le faisant, il donnera la possibilité aux Congolais de se choisir un autre président qui pourrait venir de la majorité actuelle, de l’opposition ou de la société civile.
Pourrions-nous vous prier, dans vos différents contacts avec le Président Joseph KABILA, de l’encourager à quitter démocratiquement le pouvoir en 2016.
Excellences Mesdames et Messieurs les ambassadeurs,
Le peuple congolais a beaucoup souffert à cause des caprices des dirigeants politiques qui ne mettent pas au centre de leur agenda politique les intérêts des populations civiles. Nous avons toujours pensé que ce peuple a le droit naturel de combattre tout gouvernement qui viole les droits de l’Homme et qui met en péril la démocratie.
Mais, l’histoire démontre que face aux hommes et femmes déterminés à conserver le pouvoir politique quel qu’en soit le prix, le peuple a besoin de l’assistance de vos pays respectifs pour que les principes démocratiques mis en place dans l’intérêt de tous soient respectés.
Nous avons voulu partager avec vous ces préoccupations avec espoir qu’elles seront inscrites à l’agenda de vos échanges avec le Président Joseph KABILA et autres responsables politiques congolais. Veuillez croire, Excellences Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, l’expression de nos sentiments de parfaite considération.
Pour l’ASADHO
Me Jean Claude
KATENDE
Président National