Coalition de 33 Ong : » Corneille Nangaa s’est trompé d’époque et de textes applicables «
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Projet de la Ceni de saisir la Cour constitutionnelle pour prolonger le délai de l’élection présidentielle en RDC
Selon le coordonnateur de cette structure, s’il n’y a pas d’élection présidentielle dans
le délai constitutionnel, l’article 75 de la Constitution sera d’application
La Coalition pour le respect de la Constitution (CRC), plateforme regroupant 33 Organisations de défense des droits humains, dénonce, avec la dernière énergie, le projet de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) de saisir la Cour constitutionnelle en vue de faire prolonger illégalement le délai de l’élection présidentielle en République démocratique du Congo (RDC).
Lors d’un point de presse tenu hier dimanche 20 mars 2016, cette Coalition, à travers son coordonnateur, Me Georges Kapiamba, constate avec préoccupation que » le président de la Commission électorale nationale indépendante s’est totalement trompé d’époque et de textes applicables « .
Cette structure s’est prononcée ainsi après avoir analysé la situation juridique et institutionnelle au cas où l’élection présidentielle ne serait pas organisée dans le délai constitutionnel.
» S’il est vrai qu’à l’époque de la Constitution du 4 avril 2003 régissant la période de transition politique en République démocratique du Congo, la prolongation de la période de transition était possible conformément à son article 196, il n’en est pas ainsi actuellement « , souligne Me George Kapiamba.
En effet, l’article 196 de la Constitution du 4 avril 2003, rappelle Me Kapiamba, était libellé comme suit : » La durée de la transition est de 24 mois. Elle court à compter de la formation du gouvernement de transition et prend fin avec l’investiture du président élu à l’issue des élections marquant la fin de la période de transition en République démocratique du Congo.
Toutefois, en raison de problèmes spécifiquement liés à l’organisation des élections, la transition peut être prolongée pour une durée de six mois renouvelable une fois, si les circonstances l’exigent, sur proposition de la Commission électorale indépendante et par une décision conjointe et dûment motivée de l’Assemblée nationale et du Sénat « .
Cependant, insiste la Coalition de 33 Ong, la Constitution du 18 février 2006 qui régit actuellement la RDC, ne contient aucune disposition ayant le même contenu en lettre ou en esprit avec l’article 196 pré-rappelé de la Constitution du 4 avril 2003.
Elle ne prévoit aucune hypothèse d’une prolongation de délai de l’organisation de l’élection présidentielle. Par contre, son article 73 impose formellement à la Ceni l’obligation de convoquer le scrutin pour l’élection du président de la République 90 jours avant l’expiration du mandat du président en exercice.
L’article 161 brandi
S’agissant de la saisine proprement dite de la Cour constitutionnelle en interprétation de la Constitution, la Coalition rappelle qu’au terme de l’article 161 de la Constitution en vigueur, seuls le président de la République, le gouvernement, le président du Sénat, le président de l’Assemblée nationale, le dixième des membres de chacune des chambres parlementaires, les gouverneurs de province, ainsi que les présidents des Assemblées provinciales peuvent saisir la Cour constitutionnelle en interprétation.
» Le président de la Ceni n’en a pas qualité « , insiste Me Georges Kapiamba, rappelant que cette cour avait réaffirmé ce principe dans son arrêt R.Const.008/2015 du 08 août 2015.
Les 33 Ong insistent sur le respect du principe de droit qui prescrit que les compétences juridictionnelles sont d’attribution et qu’il en est autant pour celles de la Cour constitutionnelle. » Dans tous les cas, la Constitution de la RDC n’a pas attribué à la Cour constitutionnelle la compétence de prolonger le délai de la tenue de l’élection présidentielle pour que la Ceni pense en solliciter « , peut-on lire dans la déclaration de la CRC.
En cas de non respect du délai, l’article 75 s’applique
Les 33 Ong considèrent le projet de saisine de la Cour constitutionnelle comme une énième stratagème de la Ceni pour ne pas organiser l’élection présidentielle dans le délai constitutionnel. » La Ceni joue le jeu du gouvernement afin de lui assurer un maintien au pouvoir en violation des règles constitutionnelles « , dénoncent-elles. C’est ainsi, à titre d’exemple, qu’elle s’est donnée cinq mois pour l’appel d’offre international alors que le marché était déjà conclu avec une entreprise bien connue depuis novembre 2015 avec un cahier des charges déjà élaboré par son actuel président.
La Coalition rejette donc la mauvaise interprétation de l’article 70 de la Constitution qui vise tout simplement à encourager les manœuvres dilatoires constatées à ce jour. Pour la Coalition, l’article 70 parle » du » président élu, et non » d’un » président élu. «
Du » est un article défini qui signifie qu’il faut qu’il y ait un tel » élu » pour que le président sortant reste éventuellement en place jusqu’à l’investiture de son successeur qui est déjà élu.
» S’il n’y a pas d’élection présidentielle dans le délai constitutionnel, on devra appliquer l’article 75 qui prescrit qu’ » en cas de vacance pour cause de décès, de démission ou pour toute autre cause d’empêchement définitif, les fonctions de président de la République (…) sont provisoirement exercées par le président du Sénat « .
Car le » ou » pour toute autre cause d’empêchement concerne aussi, bien entendu, le dépassement des deux mandats successifs de cinq ans.
Les 33 Ong demandent vivement au président de la Ceni de renoncer à son appel international qui constitue, selon elles, une manœuvre dilatoire d’envisager l’enrôlement des nouveaux majeurs présents sur le territoire national en cinq mois au maximum, le nettoyage du fichier électoral en un mois, et convoquer le scrutin pour l’élection présidentielle à la fin du mois de septembre 2016 en vue de respecter le délai constitutionnel.
La Coalition recommande au président de la Ceni de faire preuve d’indépendance dans l’exercice de ses fonctions, de ne pas se laisser commettre un acte de parjure et de travailler d’arrache-pied pour sauver le processus électoral afin de permettre aux Congolais de participer à la désignation libre de leurs dirigeants.
Par Lefils Matady