Réforme du code minier en RDC: La Volte-face de Kinshasa déplorée
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Sous la pression des sociétés minières, et face à la chute des prix ainsi que la fermeture des mines, le ministre des Mines , Martin Kabwelulu, a récemment annoncé que le gouvernement de la RDC renoncerait à son plan de réforme du Code Minier en vigueur depuis 2002. Bien que la déclaration fût apparemment destinée à apporter de la clarté à un processus qui se trouve dans l’incertitude depuis le dépôt du projet de loi à l’Assemblée nationale en Mars 2015, l’ambiguïté persiste avec des signaux contradictoires provenant de différentes entités de l’Etat congolais.
En effet, la réforme de la législation minière, lancée en 2012, était une priorité pour la RD Congo. Le gouvernement visait l’augmentation des recettes grâce à la réforme du régime fiscal, et la société civile cherchait à accroître la transparence dans la gestion du secteur et l’impact sur le développement local.
Compte tenu de l’importance du secteur minier pour l’économie congolaise, il est important d’évaluer l’impact d’un abandon de la réforme du code minier. » Il est également important d’envisager quelles options, le cas échéant, permettraient de sauver une réforme que nous jugeons nécessaire « , note Me Jean- Pierre Okende, responsable pour la RDC auprès du Natural Resource Governance Institute (NRGI).
Illusoire d’attendre une hausse des prix
» On peut être tenté de penser que les réformes devraient être mises de côté pour l’instant, les projets miniers étant déjà sous une forte pression financière, et être réengagées lorsque la conjoncture se montrera plus favorable. Mais vu l’approche du code minier de 2002 sur la garantie de stabilité fiscale et juridique, à savoir, la » stabilisation « ), cette position est discutable, explique-t-il.
En effet, le code de 2002, dans son article 276, prévoit que toute modification du cadre juridique, y compris fiscale, ne serait applicable aux projets existants que dix ans après son adoption, afin de maintenir un niveau de stabilité attractif pour les investisseurs. Mais le projet de loi de révision du code minier incluait toutefois un élément clé, l’augmentation des redevances -applicable immédiatement; une position rejetée expressément par les entreprises.
Ainsi, même si le gouvernement attendait que les cours des minerais remontent, toute réforme fiscale adoptée à ce moment-là ne serait applicable aux projets existants que dix ans plus tard.
Il est difficile de savoir ce que les prix, et donc l’impact sur les recettes publiques, seraient à un horizon si lointain. L’approche du code de 2002, avec une période de stabilisation déclenchée par la modification de la loi plutôt que par la date d’octroi du titre minier, est tout à fait inhabituelle, indique une étude menée au niveau régional et international par le NRGI.
» La RDC aurait intérêt à revoir cette approche dans toute réforme du code. L’approche actuelle désavantage considérablement le gouvernement dans l’élaboration de sa politique économique car, avec cette contrainte, les changements fiscaux sont effectués à l’aveugle, sans aucune connaissance du contexte dans lequel ils seront finalement applicables « , conseille Me Okende.
Un compromis sur les questions fiscales est possible
» Même si la disposition sur la stabilisation mentionnée ci-dessus rend la situation de la RDC plus compliquée, il est clair que les défis actuels du secteur minier ont un impact sur l’appétit des gouvernements et des entreprises pour les réformes fiscales. Néanmoins, il y a des raisons de croire que, même dans ce contexte, un compromis sur les questions fiscales du code minier reste possible « , estime Me Okende.
Selon lui, l’un des objectifs de base du gouvernement dans cette révision a toujours été de réformer le régime fiscal en faveur de l’Etat.
Après avoir discuté de la situation avec différentes parties prenantes en RDC, le NRGI mène actuellement une analyse indépendante des éléments fiscaux du Code minier de 2002 et du projet de loi soumis à l’Assemblée nationale.
Cette analyse utilise la modélisation financière et évalue le régime fiscal global (plutôt que de se concentrer sur un seul instrument fiscal comme les redevances) et compare la RDC avec d’autres pays similaires en fonction de facteurs tels que la géologie, l’environnement des affaires et les coûts opérationnels.
» Nos résultats préliminaires indiquent qu’il y aurait des compromis possibles qui pourraient présenter un intérêt pour toutes les parties concernées. Nous avons constaté que le code de 2002 est l’un des plus généreux pour les investisseurs parmi les pays producteurs de cuivre et d’or que nous avons étudiés.
En revanche, le projet de loi produirait une augmentation très importante du taux d’imposition effectif, plaçant le taux de la RDC parmi les plus élevés des pays étudiés, potentiellement au-dessus même du Chili, un des principaux producteurs de cuivre et un pays avec un environnement d’investissement nettement plus favorable que la RDC.
Ces résultats ne tenaient même pas compte de l’impôt sur les profits excédentaires inclus dans le projet de loi, qui, mis en œuvre tel qu’il est actuellement rédigé, augmenterait considérablement les taux d’imposition sous certains scénarios de prix « , explique-t-il.
En même temps, le projet de loi portant réforme du code minier comprend des éléments positifs tels que des mesures plus sévères contre la sous-capitalisation et les prix de transfert et un meilleur alignement avec les dispositions de droit commun.
L’analyse de NRGI indique que la proposition fiscale du gouvernement dans le projet de loi va probablement trop loin sur le taux d’imposition effectif, compte tenu surtout de la possibilité de révision du régime fiscal dans les pays voisins. Mais l’analyse indique aussi l’existence de compromis qui pourraient améliorer la situation fiscale du gouvernement par rapport au code actuel tout en étant
Par Godé Kalonji