Dans son discours sur l’état de la nation : Kabila dévoile son avenir politique
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Selon le président de la République, cette question est réglée par la Constitution qu’il entend respecter. Tshisekedi et la communauté internationale taclés. Le 1er ministre du glissement… bientôt.
A 34 jours de la fin de son mandat constitutionnel, le chef de l’Etat Joseph Kabila a prononcé un discours, hier mardi 15 novembre 2016, sur l’état de la nation, devant les deux chambres du parlement réunies en congrès.
Un discours récapitulatif de ses 15 ans passés à la tête de la République démocratique du Congo, assorti d’une autoévaluation frôlant la mention « Grande distinction », alors que les réalités sur le terrain démontrent le contraire.
Comme on s’y attendait, le président de la République a eu des mots durs, à peine voilés, envers le président du Comité des sages du Rassemblement, Etienne Tshisekedi, de même que la communauté internationale, en cette période où la République démocratique du Congo a besoin de la cohésion et de la réconciliation pour traverser cette période extrêmement trouble de son histoire politique.
Dialogue politique national, désignation du premier ministre… ont également constitué l’ossature de l’adresse du premier citoyen congolais.
En effet, de 12h10’ à 13h00’, sous la ponctuation des applaudisseurs, Joseph Kabila a balayé toutes ces questions essentielles auxquels l’opinion cherchait des réponses. Certains Congolais se disent satisfaits, d’autres estiment que l’orateur aurait mieux fait de se taire, au lieu de « provoquer » la population, selon le terme employé par Jean-Claude Vuemba lors d’une interview en ligne.
De l’avenir politique de JK
« Pour ce qui est de mon avenir politique, la République démocratique du Congo est une démocratie constituante. Toutes les questions sont réglées par la Constitution », a-t-il dit, avant d’ajouter que cette loi-fondamentale qui n’a « jamais été violée », sera toujours respectée dans toutes ses dispositions.
Pour d’aucuns, Kabila a raison car la Constitution dit, dans son article 70, alinéa premier, que « le président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois ».
Et au 220 de verrouiller, « … le nombre et la durée des mandats du président de la République, l’indépendance du pouvoir judiciaire, le pluralisme syndical, ne peuvent faire l’objet d’aucune révision constitutionnelle ». En clair, même s’il a l’intention de modifier la Constitution, il existe des articles qu’il ne peut, en aucun cas, retoucher.
Mais d’autres observateurs avertis estiment que le président cache encore ses intentions de rempiler. « Il aurait mieux fait de dire clairement qu’il ne sera pas candidat aux prochaines élections », a réagi un Congolais après avoir suivi religieusement ce discours sur l’état de la nation.
Des mots peu tendres à l’endroit de la communauté internationale et de Tshisekedi
Près de 10 minutes ont été uniquement consacrées à tacler Etienne Tshisekedi et la communauté internationale, sous les acclamations des applaudisseurs et autres cadres de la Majorité présidentielle qui ne cessaient de lancer des slogans de soutien à leur autorité morale pour qui ils souhaitent une « éternité » (wumela) à la tête de la République démocratique du Congo (RDC).
En ce qui concerne, indirectement, le président du Comité des sages du Rassemblement, Joseph Kabila a dit condamner « fermement » les évènements des 19 et 20 septembre 2016 à Kinshasa, suite à la marche de l’Opposition, réunie au sein du Rassemblement, pour infliger un « carton jaune » au président Kabila, lui rappelant qu’il devra quitter le Palais de la nation dans trois mois.
« La stabilité politique doit être considérée comme un patrimoine commun. Ce, pour le renouvellement continu de la classe politique. Aucun agenda politique ne saurait justifier la violence, moins encore des pertes en vies humaines.
Miser sur le sang du peuple congolais pour accéder au pouvoir, c’est condamnable », a-t-il lancé, bénéficiant une fois de plus des applaudissements frénétiques et autres cris d’encouragement. Et d’ajouter, « soucieux de mes responsabilités de garant du bon fonctionnement des institutions, je ne peux permettre que la République démocratique du Congo ne soit prise en otage par une frange de sa classe politique ».
La communauté internationale a également eu sa part. « Je dénonce toute ingérence dans les affaires internes de notre pays. La RDC insiste sur le respect de sa souveraineté et de son indépendance politique, et n’entend pas transiger là-dessus ». Et de poursuivre, « l’instrumentalisation malveillante de certaines officines n’est qu’une nostalgie révolue ».
1er ministre du glissement…bientôt
L’accord du dialogue politique de la cité de l’Union africaine signé le 18 octobre dit clairement que le gouvernement devra être mis en place dans 21 jours « à dater de la signature du présent accord ».
Depuis donc le 9 novembre, jusqu’à présent, Matata Ponyo n’est toujours pas remplacé. Ce texte est déjà violé. Hier, le chef de l’Etat a rassuré que « bientôt », un premier ministre sera désigné, chargé de former le gouvernement d’union nationale.
Comme mission principale, c’est de « conduire le peuple congolais aux élections ». Parmi d’autres priorités, cette équipe devra œuvrer à l’amélioration du social de la population. Une tâche extrêmement difficile lorsqu’on sait que le budget de l’Etat pour l’exercice 2017 est réduit de moitié, par rapport à 2016.
Joseph Kabila n’a pas manqué de saluer le premier ministre sortant, Augustin Matata Ponyo, et tout son gouvernement qui, avec dévouement, « ont abattu un travail remarquable durant quatre ans ».
Un clin d’œil a également été fait au Togolais Edem Kodjo, présent dans la salle, facilitateur désigné par l’Union africaine pour accompagner les Congolais dans ce dialogue non inclusif dont les résolutions souffrent déjà de leur application.
D’ailleurs, le président Kabila a demandé à tous ceux qui n’ont pas siégé à la cité de l’UA de venir apposer leurs signatures dans ce document, comme l’ont fait Willy Mishiki et autres, chassés du Rassemblement.
« Cet accord constitue à ce jour la seule feuille de route mise au point par des Congolais eux-mêmes, représentant aussi bien l’Opposition, la Majorité que la société civile ».
L’orateur a, enfin, invité la classe politique à se préparer à aller à l’encontre des électeurs car, dans quelques mois, le fichier électoral sera prêt, et les élections convoquées.
Par rapport au travail abattu par la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), il a loué les efforts entrepris par Corneille Nangaa pour l’acquisition et l’acheminement des kits électoraux, jusqu’à leur répartition dans différents sites.
Des réactions des personnalités politiques et de la société civile n’ont pas tardé, immédiatement après le passage du président de la République au Palais du peuple.
Pour Jean-Claude Katende de l’Asadho, « le discours de Kabila prédit une confrontation entre le Rassemblement et la Majorité présidentielle ». De son côté, Jean-Claude Vuemba estime « Kabila n’avait rien à dire… il vient défier le peuple… ».
Par LM